Noëlle Bastin, Baptiste Bogaert • Réalisateurs de Vitrival
"Il nous tenait à cœur d’interférer le moins possible avec notre fiction dans la manière dont vivent vraiment les gens"
par Teresa Vena
- Nous avons parlé avec le duo de réalisateurs de leur dernier film, son ancrage dans la réalité et leur travail avec des acteurs non-professionnels
Le duo de cinéastes belges Noëlle Bastin et Baptiste Bogaert ont présenté leur dernier long-métrage Vitrival [+lire aussi :
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Cineuropa : Comment avez-vous choisi ce village ?
Noëlle Bastin : C'est le village où j'ai grandi. On avait envie de refilmer Benjamin et François, l'homme qui est assis au carrefour, qu'on avait déjà filmé dans un de nos autres films. Ils sont tous les deux mes cousins. Toutes les personnes du film sont des personnes du village ou font partie de ma famille. Mise à part cela, par rapport au sujet de la vague de suicide, on trouvait que c'était intéressant que cela se passe dans un seul lieu, assez petit. De cette façon tout le monde se connait et la vague de suicide semble d'autant plus étrange.
Baptiste Bogaert : Pour nous, c'est vraiment très important de connaître très bien les lieux et les personnes qu'on filme. Cela signifie aussi que la possibilité des territoires n'est pas extensible et qu'on filme vraiment les quelques endroits qu'on connaît très bien.
Comment avez-vous développé les différents personnages ? Quel était le point de départ ?
B.B. : On s'est demandé comment créer une sorte de moteur de fiction qui pourrait nous faire explorer le village et les différents liens qu'il y a entre les habitants. Rapidement, on a eu l'envie de développer un couple de policiers qui seraient à la fois des policiers mais aussi des citoyens de ce village qui sont vraiment très bien intégrés à la vie locale. Ce qui nous intéressait dans la figure du policier, c'est pas spécialement avoir des personnes qui mènent l'enquête mais plutôt que ce soit des agents de quartier et qu'ils soient donc surtout là pour faire des patrouilles afin de voir si tout va bien. On les considère un peu comme des véhicules fictifs qui nous permettent d'aller à la rencontre du village et nous permettent aussi, par moment, d'avoir des scènes qui sont purement documentaires.
N.B. : Les policiers sont les personnages les plus fictifs, c'est sur eux qu'on projette le plus d'éléments. Avec eux, les spectateurs et les spectatrices eux-mêmes patrouillent le village, on peut s'arrêter un peu partout et en fonction de ce qui nous intéressait par rapport à la vie du village. Pour les différentes personnes, on a créé des caractères en les rapprochant de personnes qu'on connaissait et avec qui on avait envie de développer une situation avec les deux policiers.
B.B. : La plupart des personnes jouent leur propre rôle et on les filme dans leurs propres habitations. Il nous tenait à cœur d’interférer le moins possible avec notre fiction dans la manière dont vivent vraiment les gens et la manière dont ils occupent le village.
N.B. : Après, c'est clair qu'on sélectionne ce qui nous intéresse dans les différentes personnes. L'ensemble forme un tout et une vie du village comprimée en moins de deux heures.
Dans quel détails avez vous écrits les dialogues et les scènes ? Il a, par exemple, le moment avec le modérateur de la radio qui passe le message que quelqu'un a perdu son foulard. C'est une vraie observation ?
N.B. : Cette scène était écrite. On a demandé à Jean-François de la radio de dire quelques phrases comme celle-ci. Puis, cette radio-là qui existe vraiment, un peu à côté du village, où on entend vraiment des choses comme celle-ci. On aimait bien l'idée que des petites remarques de ce genre créent ce lien entre les gens.
B.B. : Une autre chose par rapport à l'écriture des dialogues, c'est qu'on –et surtout Noëlle– connaît la façon de parler des gens. Ce qu'on essayait toujours de faire, c'était de toujours travailler des rôles en fonction des personnes et ne jamais essayer de faire jouer des états ou des comportements à contre-emploi, ça colle toujours vraiment le plus possible à ce qu'est la personne. S'il y a certaines choses qui sonnent fausses, on réécrit sur le moment même.
Vous avez donc travaillé uniquement avec des acteurs non-professionnels ?
B.B. : Pour tous nos films, on tourne toujours avec des non-professionnels. Vu qu'ils ont tous une vie assez bien remplie et qu'ils ont leur travail sur le côté il était difficile de faire des répétions. Ainsi c'était impressionnant de voir qu'ils avaient une telle faculté à retenir les dialogues, comme on ne l'a jamais vu.
N.B. : Pierre et Benjamin, les deux policiers, particulièrement. C'était les seuls avec qui on répétait vraiment les scènes, quelques jours avant le tournage. Mais eux aussi, vu que le film s'est fait en plusieurs tournages, au deuxième ou troisième tournage, ils lisaient juste le scénario, ils répétaient à deux, et puis après on le faisait, ils connaissaient le texte directement.
(Traduit de l'anglais)
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