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KARLOVY VARY 2024 Proxima

Zhengfan Yang • Réalisateur de Stranger

“Je ne me sens pas le besoin de faire partie d'un certain endroit ou pays”

par 

- Le cinéaste chinois s'intéresse à la chambre d'hôtel en tant que non-espace et épicentre de la non-appartenance

Zhengfan Yang • Réalisateur de Stranger
(© Film Servis Karlovy Vary)

Le réalisateur chinois installé aux États-Unis Zhengfan Yang évoque régulièrement le sentiment d'être un outsider dans un espace socialement construit. Son film Stranger [+lire aussi :
critique
interview : Zhengfan Yang
fiche film
]
, qui s'inspire de son expérience personnelle et vient de remporter le Grand prix de la compétition Proxima du 58e Festival international du film de Karlovy Vary, révèle le grand sentiment d’aliénation que ressent tout individu dans l’espace impersonnel qu'est une chambre d’hôtel.

Cineuropa : Vous êtes cinéaste et vous voyagez beaucoup. Vous logez probablement aussi dans un hôtel ici à Karlovy Vary. Est-ce de cela que l’idée vous est venue de tourner un film dans des chambres d’hôtel ?
Zhengfan Yang :
C’est lié de près au fait que j'ai occupé de nombreuses chambres d’hôtel partout dans le monde. La chambre d’hôtel représente notre aliénation et l'isolement qui marque la vie moderne. L’idée du film m'est venue en 2016, quand j'ai quitté la Chine pour m’installer aux États-Unis. Vivre entre ces deux pays a intensifié mon sentiment d’être un outsider. Aux États-Unis, ça tient à la langue et à la culture, mais en Chine, les changements rapides que connaît le pays le rendent méconnaissable à mes yeux à chaque fois que je j’y retourne. Ainsi, je me sens extérieur dans mon pays natal aussi. Les chambres d’hôtel comme espace cinématographique rendent compte de mes sentiments personnels ainsi que de l’expérience universelle de la vie moderne.

La notion de "chez soi" revient beaucoup dans ce film, mais il n’y a jamais de réponse claire sur sa signification exacte.
Je me pose cette question depuis un certain temps. J'ai déménagé aux États-Unis à l'âge de 30 ans, et cela fait dix ans que j'y vis. Et si je finissais par y passer, disons 20 ou 30 ans de plus ? Où serait mon "chez moi" ? Je n’ai pas la réponse, parce que je ne me sens pas le besoin d’appartenir à un endroit ou un pays. Je veux toujours observer les choses selon la perspective d'un outsider.

La chambre d'hôtel est un espace en soi. Il est transitionnel. Sentiez-vous le besoin de conserver sa neutralité par rapport aux personnages qui l'habitent ?
Je pense. Les non-espaces ont été un concept clef tout au long du développement du film. Les chambres d’hôtel sont pareilles partout dans le monde. Si on voit une chambre d’hôtel à l’écran sans personne dedans, on ne sait pas où elle se trouve. La différence est quelque chose qu’on ne voit pas à l’écran. Elle est en dehors de la chambre, hors du champ. Et ce "dehors", c’est la Chine contemporaine. Dans les chambres, on voit des Chinois d’aujourd’hui. Donc bien sûr, le film pourrait se passer n’importe où, mais je voulais faire un film sur les Chinois d’aujourd’hui dans un espace moderne.

Qu’est-ce qui vous plaît dans le fait d’être un outsider ?
Mon premier long-métrage a été tourné dans ma ville natale en Chine. Ensuite, j’ai vécu à Hong Kong pendant quatre ans. C’est là que j’ai tourné mon deuxième film. Après, je suis parti aux États-Unis. J'ai tourné mon troisième film, qui était un documentaire, à Chicago. C’est toujours une expérience personnelle que je livre à travers mes films. Stranger a été développé sur de nombreuses années. Je peux voir la Chine avec le regard d'une personne extérieure. C’est pour ça que j’ai construit un film qui réunit plusieurs histoires indépendantes au lieu de n'être porté que par un seul récit, pour brosser un tableau panoramique de la société.

Vous avez aussi ajouté au film un de vos courts-métrages, Down There.
Sur le plan visuel, Down There a été réalisé selon les mêmes principes que la dernière scène de Stranger. C’était une histoire différente, mais le scénario original de cette scène aurait été trop dramatique si je l’avais utilisée comme fin pour Stranger. J'ai donc décidé de faire un court-métrage indépendant à la place, et de garder la même fin pour Stranger.

(Traduit de l'anglais)

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